Illectronisme, IA et lutte des class : pourquoi nous sommes tous concernés

L’intelligence artificielle est devenue le nouvel horizon promis de notre monde numérique. Mais pour ceux qui peinaient déjà avec les bases du numérique, formuler un « prompt » risque de devenir le nouveau défi insurmontable et de compliquer encore plus la lutte contre l'illectronisme. À cela s'ajoutent les doutes et les risques de l'IA que nous avons encore du mal à définir et maîtriser, et qui suscitent de nombreux débats, dans le public comme dans le privé. Résultat : la méconnaissance du numérique ajoutée à l'arrivée de l'IA risque de créer l’illusion de la maîtrise.
Le périmètre de l’illectronisme, qui empêchait déjà certaines catégories de personnes d'apprivoiser les usages du numérique, s'étend encore et pourrait bien entraîner des usages non éthiques ou non qualitatifs de l'IA. Heureusement, les états européens ont pris conscience de l'importance du sujet et s'engagent, chacun à leur manière, dans la formation de leurs citoyens, particuliers et professionnels.
Quand la fracture numérique se renforce à l’âge de l’IA
En France, selon l’INSEE, autour de 15 % des Français de 15 ans et plus sont encore éloignés du numérique, avec des pointes proches de 62 % chez les plus de 75 ans. Ces chiffres ne témoignent pas seulement d’un déficit technique : ils traduisent la persistance d’une précarité de compétences rendue d’autant plus inquiétante que l’IA, présentée comme incontournable, devient le nouveau marqueur de l’exclusion. La question n’est plus seulement de savoir cliquer ou naviguer, mais de savoir demander, comprendre, juger, critiquer. Et nombreux sont ceux qui n’ont ni vocabulaire, ni repères, ni formation pour le faire.
C'est d'autant plus inquiétant quand on sait que même des professsions intellectuelles se sont laissés prendre. Car non, ChatGPT n'est pas infaillible et parfois, ChatGPT invente.
Au-delà de nos frontières, les disparités sont tout aussi marquées. En Allemagne, en Espagne, au Royaume-Uni ou en Italie, des programmes numériques existent, mais il est rare de voir les formations à l’IA démarrer dès le lycée – comme dans les pays nordiques, où les concepts digitaux, éthiques et programmatiques font partie du cursus général. En France, l’Éducation nationale accuse un retard certain : le numérique reste souvent cantonné aux filières techniques, loin de devenir un socle commun du savoir-être numérique.
Des personnalités médiatiques comme Laurent Alexandre, fondateur de Doctissimo font partie de ceux qui interpellent l'état à ce sujet. Et le moins qu'on puisse dire, c'est qu'il n'est pas optimiste. Or, dans un contexte où l'IA génère parfois des fantasmes et des peurs irrationnelles, une mauvaise utilisation de celle-ci pourrait justement renforcer le camp des frileux et ainsi freiner les avancées de cette révolution industrielle.
Des initiatives en France, mais encore faut-il les connaître
Le gouvernement a déployé des dispositifs récents pour lutter contre l'illectronisme : #Objectif IA, un MOOC accessible via France Travail et OpenClassrooms, ou encore IA Booster France 2030, mené par France Num et Bpifrance. Ces formations rapides, dématérialisées, visent à baisser la barrière d’entrée de l’IA. Le dispositif FNE-Formation, jusqu’en 2025, aide les salariés à accéder à ces compétences. La Grande École du Numérique et l’association Konexio accompagnent les publics éloignés du numérique, avec des modules intégrant l’IA dès 2024.
France Travail, lui, a créé son calendrier du numérique. L'avez-vous testé ?
Ailleurs en Europe, on lutte aussi contre l'illectronisme
Au Royaume-Uni, le programme Skills for Life propose à la population adulte des formations fondamentales en numérique, élargies à l’IA par le biais des Skills Bootcamps, tandis que le plan national Digital Inclusion Action Plan finance une montée en compétences, notamment chez les seniors, avec plus de 400 000 fonctionnaires formés à l’IA d’ici 2025 dans le cadre de la réforme du service civil.
En Espagne, le modèle Alia, financé à hauteur de 10 millions d’euros, et la création de l’agence AESIA témoignent d’une volonté publique de structurer l’usage sûr et accessible de l’IA.
En Allemagne, le AI Campus du gouvernement fédéral propose des MOOC dédiés à l’IA, la cybersecurity et le cloud spécifiquement pour les citoyens et professionnels.
Formations & webinaires IA / inclusion numérique – par organisme
En tout état de cause, les solutions ne viendront pas des seuls états et il sera difficile d'opérer un rattrapage afin de permettre à tous d'avoir le même niveau d'accès aux outils du numérique et à l'IA. Mais la lutte contre l'illectronisme pourrait bien reposer aussi sur les entreprises privées (qui ont intérêt à ce qu'on sache se servir de leurs outils :-).
Puisque sur ce site, nous plaidons pour une formation continue tout au long de la vie, voici une brève liste des initiatives gratuites ou payantes développées par l'état et/ou les grands noms du web, pour les particuliers ou pour les professionnels, afin de promouvoir une meilleure connaissance de l'IA par organisme :
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